Aujourd hui je vous amène vers l Ermitage de Domanova qui domine la vallée de la Têt
Perché au sommet d’une colline dominant la vallée de la Tet,
l’ermitage de Domanova, source d’inspiration du poète Francis
Catala, illustre la dévotion populaire du Conflent, au travers
notamment de son retable issu de l’atelier Sunyer.

Le retable de la Vierge, retable à panneaux peints d’origine
gothique remanié au XVIIe siècle, a été restauré récemment.
Une des salles de cet ermitage abrite une collection d’ex-votos
peints sur bois, datés du XVIIIe siècle.

L'ancienne paroisse de Crozes
Le nom de Domanova provient de Doma-Nova, ce qui signifie "la maison neuve".
A l'origine un village, Crozes, s'étendait au pied de la colline de Domanova.
Un seigneur local fit bâtir un château sur le sommet de cette colline, qui n'était
en fait qu'une maison plus solide que les autres et surtout surveillée.
C'était elle, la "maison neuve". On y avait adjoint une chapelle.

Durant le Xe et XIe siècle les habitants de Crozes vivaient sous la protection
de ce château, dont on a retrouvé une traces écrites dans un document
datant de 942. Mais la protection n'était pas assez efficace, aussi a t-il été
décidé de construire un deuxième château sur le versant Nord de la vallée
de la Têt : le château de Rodès.

Dès qu'il fut fini (en 1080 le château de Rodès était terminé) la population
parti pour Rodès, délaissant Domanova qui devint une paroisse fantôme,
puisque jusqu'en 1571 elle conserva le titre de paroisse. Le second fils de
Raymond II de Canet a porté le nom de Pierre de Domanova.

On retrouve cette chapelle durant cette période à plusieurs reprises :
En 1293 sous le nom de Ecclesia Sanctae Mariae, puis en 1329 sous
celui de Parrochia Sanctae Mariae de Domanova.

L'ermitage de Domanova
Ainsi délaissée, l'église de Crozes subira en 1580 les invasions
des huguenots français. Certains huguenots, poursuivit en
France suite au massacre de la St Barthélémy, se sont ligués
et ont commis des exactions en Roussillon et Conflent durant
quelques années. Domanova sera pillée et sérieusement abîmée
à cette occasion, l'ermite sera même assassiné.
Le XVIIe siècle fut celui de l'essor des ermitages.

Cette pratique ancestrale (déjà pratiquée au IXe siècle en Catalogne Sud)
se développa rapidement. Toutes les anciennes chapelles, qu'elles soient
d'origine paroissiales ou castrales, furent réhabilitées. On les modifia et
on construisit des bâtiments annexes pour accueillir l'ermite.
Ce fut le cas de l'ancienne église de Crozes, qui apparaît sous le vocable
de Nova constructio de la capella en 1648, puis de Hermita de Nostre
Senyora de Domanova en 1688, ce qui prouve sa réhabilitation.
A cette occasion une deuxième nef fut construite, parallèle à la précédente,
et le mur Est fut reconstruit pour soutenir le logement.

Les ermites du Roussillon, entre les XVIIe et XVIIIe siècle,
n'étaient pas du tout des religieux vivants isolés, ils étaient
au contraire des membres de la société civile catalane. Ils étaient
physiquement accessibles, et détenaient un bien précieux :
le savoir. Ils représentaient la connaissance, le bon sens, et on
les respectaient pour ça. Les habitants de la région allaient les
rencontrer pour résoudre des problèmes de moralité en particulier.
Mais cette situation ne dura que jusqu'à la révolution française.

En 1790 la toute jeune république vota une loi qui déclarait que
les biens de l'Eglise étaient des possessions de l'Etat.
Ainsi tous les édifices religieux qui n'étaient pas le siège d'une
paroisse furent vendus comme biens d'Etat, ce qui était le cas de Domanova.
La chapelle fut rachetée par la municipalité de Rodès.
Quelques années plus tard les lois anti-cléricales furent assouplies,
les ermitages purent réouvrir au culte. Domanova put le faire dès
1806 où elle apparaît comme une annexe de Rodès.
Un nouvel ermite prit place dans la chapelle, un ermite moderne,
issu de la dernière génération des ermites.
Ils étaient n'étaient pas des religieux mais des laïcs, s'habillaient
donc en tenue catalane et plus en bure. Ils poursuivaient leurs rôles
de quêteurs mais n'avaient plus l'aura d'autrefois.
Dans les années 50 le dernier ermite disparut et cette étrange activité avec.
La chapelle sera restaurée pour la dernière fois en 1996.
Pendant l'été elle accueille les personnes désirant faire une
retraite religieuse. La chapelle possède de nos jours une collection
d'ex-voto peints sur bois (datée du XVIIIe) ainsi qu'un retable fait
par Joseph Sunyer, le retable de la Vierge à l'enfant. Citons enfin le
fait que Domanova a été la principale source d'inspiration du poète Francis Catala.
Comme la forme de son clocher le prouve, l'ermitage de
Domanova avait initialement trois cloches.
L'une a disparu pendant la 1ere guerre mondiale, probablement
fondue pour en faire des canons. Une seconde a été remplacée
récemment : Elle porte le nom de Michel. Quand à la troisième,
on ignore ce qui lui est arrivé.

L’édifice actuel date du XVIIe/ XVIIIe siècle.
C’est un des plus importants ermitages du Conflent.
Il est sous la protection de la Vierge, les aplecs y sont nombreux.

Primitivement, l’église était divisée en deux nefs, l’une
dédiée à Saint-Michel l’autre à la Vierge.
Le retable de l’époque gothique conservé sur le côté de
l’actuelle nef nous donne les dimensions approximatives
d’une des anciennes nefs. L’ermitage a été endommagé dans
le contexte des guerres franco-espagnoles.

Des familles locales ont contribué à la réparation de l’édifice,
lui donnant sa forme définitive à la fin du XVIIe siècle.
Un retable à la mode post-tridentine est réalisé au début du
XVIIIe siècle. Il a été conçu pour accueillir la statue gothique
de l’ancien retable qui est présenté sur le côté de la nef.
Ce dernier a été considérablement repeint, les scènes évoquent
les principaux épisodes de la vie de Marie.
Certains thèmes sont repris sur le retable du maître-autel.
La chapelle latérale à gauche du chœur conserve un retable
XIXe dédié à saint Michel.

Les peintures murales réalisées au XIXe siècle par Oromi
relatent des épisodes importants de la vie de l’ermitage comme
la découverte de la statue de la Vierge et la « restauration » en
1869 de la statue médiévale (XIVe/XVe siècle).

Un ensemble d’ex-votos réalisés entre le XVIIe et
le XVIIIe siècle pour la plupart est conservé avec deux
« capelletes » (objets portés par l’ermite autour du cou
qui présentent des représentations sculptées ici de la
Vierge à l’Enfant et de la scène de l’Annonciation) dans
une salle jouxtant la nef. L’ermitage de Domanova est
un de ceux où l’on peut le mieux ressentir la dévotion
populaire dans les anciens comtés nord-catalans

Merci de votre visite à demain ......

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